Questions (en vrac) autour du travail social : 4. Comment éviter la stigmatisation des bénéficiaires ?

par | Jan 23, 2023 | Opinions | 0 commentaires

La principale difficulté du travail social réside dans le fait qu’elle constitue un marqueur social fort. L’entrée dans un dispositif d’intervention sociale est toujours motivée par un problème, un manque, une inadaptation. Les personnes concernées sont ainsi considérées à partir de leurs « défauts » au regard des canons d’un idéal social, d’une manière d’être ou d’une « normalité ». Ce mécanisme est stigmatisant car il marque une frontière entre le « commun des mortels » et les « vulnérables ».

La question se pose alors de savoir comment sortir de cette ornière de la stigmatisation des publics.

Seul un changement de paradigme permettra de s’affranchir de ce cercle vicieux. Pour cela, plusieurs dimensions sont à mettre au travail :

  • D’abord, affirmer que le travail social est une mission de service public au même titre que la distribution d’eau ou d’électricité. Il s’agit ici de la distribution des prestations de solidarité qu’une société inclusive doit à tous ses membres.
  • Ensuite, banaliser l’idée même d’intervention sociale, c’est-à-dire la considérer comme une modalité parmi d’autre de l’action publique et la détacher de toute considération jugeante, moralisante ou culpabilisante.
  • Mais aussi, référer l’accompagnement social à l’accès ouvert à tous au droit commun. Si l’accès au droit commun est un droit fondamental, les travailleurs sociaux occupent une fonction supplétive comme il en existe plusieurs dans notre société (enseignants : supplétifs de l’accès au savoir, personnels médicaux : supplétifs de l’accès à la santé, avocats : supplétifs de l’accès au droit, etc.).

De plus, le meilleur moyen de ne pas se vivre comme appartenant à une catégorie stigmatisée de la société, c’est de se construire une identité collective positive (comme le fait ATD-1/4 Monde avec les personnes issues de la grande pauvreté ou Act-Up avec les personnes malades du SIDA, ou les Groupes d’Entraide Mutuelle avec les malades psychiques). Cela suppose de promouvoir des organisations collectives de bénéficiaires qui sont ainsi en mesure de prendre en main leur destin et d’agir sur les organisations qui s’adressent à eux.

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Présentation de l’auteur

Roland JanvierRoland JANVIER, chercheur en sciences sociales, titulaire d’un doctorat en sciences de l’information et de la communication.
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