Faire ensemble pour prendre soin

par | Avr 28, 2017 | Droit des usagers | 0 commentaires

Quelles évolutions des organisations et des pratiques professionnelles en SESSAD pour prendre en compte les reconfigurations intersectorielles et territoriales ?

INTRODUCTION

Il s’agit « de réfléchir ensemble sur les conditions d’une organisation cohérente et attentive aux besoins des enfants, adolescents et jeunes adultes et à l’évolution des demandes des familles en lien avec la commande publique[1]. »

Pour suivre ce fil rouge, je propose dans un premier temps de définir ce que sont des institutions du « care », institution du « prendre soin ». Puis de voir en quels lieux ce « faire ensemble » peut faire institution. Puis, après avoir repéré quelques éléments de pratique cohérents avec ce projet, nous conclurons sur l’esquisse d’une organisation de travail adéquate.

  1. DES INSTITUTIONS DU « CARE »

Définir les institutions du « prendre soin » est une tâche qui dépasse le cadre de cette communication. Nous pouvons, ici, retenir trois caractéristiques essentielles qui favorisent la possibilité pour l’institution d’être bienveillante et donc soignante : La volonté de ne pas faire de tort à autrui ; l’ouverture à l’environnement ; l’action collective.

  • Ne pas nuire /ne pas aliéner

A défaut d’être toutes puissantes et de parvenir à aider, les institutions du travail social doivent au moins être vigilantes à ne pas faire de mal. Le premier ennemi du bien est la volonté de bien faire. Vouloir le bien de l’autre expose l’institution au risque totalitaire : c’est-à-dire définir, en lieu et place de l’intéressé, ce qui est bon pour autrui. « Primo, non nocere » est la maxime centrale du serment d’Hippocrate. Ne pas nuire, c’est laisser place à l’autre, ouvrir un espace qui lui appartient où il peut agir selon sa volonté. Ne pas nuire, c’est s’interdire de faire sans l’autre. Tout ce qui est fait pour l’autre sans lui est fait contre lui nous enseignent Gandhi et Luther King.

Ne pas aliéner est la conséquence immédiate du principe qui précède telle que le traduit la psychothérapie institutionnelle. Pierre Delion apporte ce commentaire : « Ce dont il s’agit pour les professionnels travaillant avec ce référentiel, c’est avant tout de ne pas être à leur insu un véhicule d’aliénation sociale, de discrimination et de ségrégation ni des patients, ni même de certaines catégories professionnelles à l’intérieur de l’établissement. (non publié) »

« Soigner l’institution pour soigner les malades » : ce slogan de la thérapie institutionnelle trouve ici toute sa place pour éclairer en quoi – ou au prix de quel travail sur elle-même – l’institution qui entend ne pas nuire peut être bientraitante.

Le SESSAD est une instance de travail « au travail » sur elle-même, sur la famille, sur l’enfant, mais aussi sur le milieu. Cette considération permet de dépasser de simples fonctions de coordination au profit d’une réelle dimension thérapeutique.

  • Ouverture et liberté

Pour prendre soin, l’institution ne doit pas être fermée. Ouverte à son environnement, elle multiplie les échanges avec le milieu où elle évolue. L’ouverture est la condition nécessaire pour échapper à la tentation totalisante décrite par Erving Goffman. L’ouverture empêche l’institution de se replier sur elle-même en s’isolant du monde, en prétendant répondre à tous les besoins de ses usagers, en se rigidifiant dans un fonctionnement bureaucratique et enfermant les bénéficiaires dans une relation exclusive et excluante avec les intervenants – qui, eux-mêmes, vivent cette coupure avec le monde extérieur.

Cette ouverture suppose, et c’est encore là une référence que j’emprunte à la psychothérapie institutionnelle, la liberté de circuler des usagers. Les lieux sont ouverts et chacun peut s’y mouvoir librement. Par lieux, il ne faut pas seulement entendre les bureaux, les enceintes ou les locaux investis de différentes fonctions (école, dortoir, salle à manger, etc.). Les lieux incluent les places, les rôles, les fonctions qui sont des instances ouvertes et souples. Les lieux mêlent subtilement le dedans et le dehors. Ils sont topographiés par des frontières qui ne font pas limite mais surfaces d’échange. C’est cette fluidité des circulations possibles dans l’ensemble institutionnel qui conditionne la capacité de l’institution à être soignante.

Le SESSAD est un lieu ouvert, génétiquement marqué par la libre circulation des acteurs entre des instances techniques, sociales et symboliques qui conditionnent le travail thérapeutique. Cette considération dépasse les missions d’orientation qui se déploient dans le paysage médico-social.

  • Faire ensemble / incomplétude

Le « faire ensemble » n’est pas un faire « entre soi » ni « entre mêmes » mais un faire « entre autrui ». Faire ensemble quand chacun dispose des mêmes compétences, des mêmes cultures, du même formatage des formations initiales n’est pas un « faire » au sens d’une création. Pour créer, il faut de la différence. Nous percevons là que « faire ensemble » pose une exigence qui, outre qu’elle dépasse les anciennes pratiques du « faire pour », du « faire faire », voire même du « faire avec », impose la confrontation d’acteurs situés dans leurs singularités, leurs particularités, leurs différences.

Mais pour être différents ensembles, il faut que chacun des membres du système institutionnel possède quelque chose – une compétence, une place, un rôle, une fonction – que l’autre n’a pas. Et donc, il faut que chacun des acteurs soit conscient de ses manques. C’est à ce prix qu’il acceptera de chercher chez l’autre ce qui fait défaut chez lui. C’est au prix de ces différences et de l’incomplétude que l’institution peut être aidante.

Le SESSAD n’organise pas des compétences autour de l’enfant. Il articule des manques qui font sens pour le projet pour l’enfant. Les dispositifs de coordination ne reposent pas sur les mêmes prémices.

  1. DES « LIEUX » POUR FAIRE INSTITUTION DU « CARE »

Les trois caractéristiques, parmi d’autres sans doute, des institutions du « care » évoquées ci-dessus ouvrent la question des lieux où ce projet institutionnel peut se développer. Car l’institution du « care » ne peut croître dans n’importe quelles conditions. Elle a besoin de lieux en adéquation avec son ambition : un territoire où s’enraciner ; un écosystème ; d’autres acteurs complémentaires à elle.

  • Des racines territorialisées

Impossible de prendre soin sans s’intéresser au contexte dans lequel ce projet se déploie. Mais là, il ne s’agit pas simplement de connaître les conditions socio-économiques des familles ou les problématiques urbaines ou géopolitiques du territoire, ou encore la situation scolaire de l’environnement. L’institution du « care » est partie prenante du milieu où elle évolue. Elle lie son destin à celui de son territoire d’action et, ce faisant, elle lie son destin à celui des habitants – de tous les habitants – parce que la question clinique n’est pas une question recluse. Elle se place au cœur de la vie de la cité. Prendre soin ne peut être mis sous le boisseau, c’est une lampe qui éclaire au-delà des bénéficiaires tous ceux qui font communauté sociale dans le lieu concerné. Pour ce faire, l’institution du « care » cherche à multiplier ses zones de contact et d’échange locales. Elle développe des ramifications qui l’enracinent dans le territoire et qui permettent au territoire d’irriguer son fonctionnement. C’est une interpénétration.

Le SESSAD, par la multiplicité des liens qu’il entretient avec les acteurs du territoire (familles, écoles, lieux de socialisation, services de soin, structures socio-culturelles, etc.) développe – ou devrait développer – un enracinement qui fait sa spécificité, qui fait de lui un acteur de développement social local.

  • Des interactivités écologiques

Cette interpénétration des dispositifs entre eux forme ce que l’on appelle un écosystème qu’il conviendrait mieux de nommer « éco-socio-système » car il « fait société ». La notion d’écosystème emprunte à deux champs de références : l’écologie et la systémie.

L’écologie c’est une chaîne d’interdépendances : la décomposition végétale nourrit l’humus qui nourrit les graines qui feront les plantes. La société, comme dispositif organisé d’interdépendances, met en interaction les humains : la survie des uns conditionne la survie des autres. Vue sous l’angle écologique, le monde n’est pas la scène d’un combat à mort de chacun pour sa survie mais un espace d’interdépendances qui conditionne, par la quantité et la qualité de celles-ci, la qualité et la quantité de la vie de chaque élément.

La systémie complète ce principe d’interdépendance en s’intéressant à la manière dont fonctionnent ces échanges. Elle introduit un principe de régulation. Entre ce que chaque élément absorbe et restitue à son environnement dans ses échanges avec les autres éléments, chacun joue une régulation qui permet de corriger les entrées et les sorties.

Envisager le SESSAD – à l’instar de tout autre dispositif – comme étant à la fois un élément d’un ensemble écologique – c’est-à-dire un élément d’intervention sociale qui dépend des autres – et un élément s’autorégulant dans ces échanges et bénéficiant des autorégulations des autres est sans doute une manière originale de le situer. Mais n’est-ce pas là sa réalité : sans la famille, sans l’école, sans les institutions médico-sociales et sanitaires, que serait le SESSAD ?

 

  • Des complémentarités solidaires

L’interdépendance nous amène à une autre dimension, moins mécanique que l’écosystème, plus politique. Système incomplet, dépendant totalement de la qualité de ses interactions avec son environnement, l’institution du « care » développe des solidarités dans et autour d’elle. Par solidarité, il faut entendre que le sort de l’autre est aussi important que le mien propre. La solidarité crée, au plan politique, une communauté de destin, choisie par ses membres.

On ne se solidarise pas uniquement pour survivre – c’est la solidarité primaire définie par Durkheim – mais aussi parce qu’on choisit ceux avec lesquels on veut survivre. La communauté solidaire est une communauté politique au sens où elle repose sur un projet commun.

Ce projet commun ne regroupe pas des « mêmes » – l’identique relève de la solidarité mécanique – mais des « semblables », c’est-à-dire des individus qui se reconnaissent mais, également, qui se différencient. Le faible s’associe au fort, l’intellectuel a besoin du manuel, le grand du petit, etc.

Le SESSAD n’est pas simplement le complément mécanique des autres éléments du dispositif médico-social d’accompagnement des enfants en situation de handicap. Il est un élément différencié d’une communauté solidaire qui regroupe, articule et solidarise des compétences.

  1. QUELLES PRATIQUES PROFESSIONNELLES ?

Les repères que nous venons de poser d’une institution du « care » situés dans des « lieux » ont des conséquences pour les pratiques professionnelles. Nous pourrions même dire que le changement de regard introduit par les points de vue énoncés bouscule les anciens repères qui ont défini les postures professionnelles habituelles. Nous pouvons illustrer cela avec trois pistes : la coéducation, l’interdisciplinarité et la coordination entre professionnels.

  • Coéducation

Coéduquer, notamment entre parents et professionnels, ce n’est pas seulement s’atteler ensemble à la tâche d’élever l’enfant. Coéduquer c’est mettre en actes, au niveau de la relation éducative, les principes du « care » qui prévalent au niveau de l’institution et de son contexte :

  • Coéduquer, c’est-à-dire associer véritablement les professionnels et les parents, est d’abord la meilleure garantie de ne pas nuire à l’enfant et surtout de ne pas l’aliéner : « vos enfants ne sont pas vos enfants mais les fils et les filles de l’appel de la vie à elle-même» nous dit Le Prophète de Khalil Gibran.
  • Coéduquer est une ouverture vers des références éducatives plurielles et ouvertes qui conditionne la liberté de l’enfant dans le chemin qu’il a à inventer pour son avenir.
  • Coéduquer manifeste à l’enfant qu’aucun éducateur, fut-il son parent, n’est complet pour lui et que c’est par les manques des uns et des autres qu’il va chercher ailleurs son devenir.
  • Coéduquer, c’est, par les relations multiples qui font sens dans la vie de l’enfant, prendre racines dans un tissu social riche et diversifié qui fait humus pour la croissance de l’enfant en humanité.
  • Coéduquer, c’est inscrire l’enfant dans un système complexe d’échanges et d’interactions qui font naturellement comprendre à l’enfant qu’il ne peut jamais se suffire à lui-même malgré ce à quoi l’incite son fantasme de toute-puissance.
  • Coéduquer, n’associe pas seulement les professionnels et les parents mais aussi l’enfant lui-même. L’enfant est dans le cercle des acteurs de son éducation. Il s’inscrit lui-même dans les complémentarités solidaires qui font sa vie et qui tracent son projet. Il est co-acteur de son éducation.

Le SESSAD est un espace de coéducation parce qu’il ne fait pas seul. Cette fonction, il faut insister sur ce point, ne relève pas simplement d’une mission de coordination.

  • Interdisciplinarité

L’interdisciplinarité est un terme qui tente de signifier le dépassement de la pluridisciplinarité et de la transdisciplinarité. La pluridisciplinarité signifierait la juxtaposition de références disciplinaires sans insister suffisamment sur la manière dont elles s’articulent. La transdisciplinarité signifierait la succession d’approches théoriques sans trop les situer dans le même espace-temps de l’acte éducatif. L’interdisciplinarité tente de corriger ces deux manques en valorisant la confrontation des approches.

L’interdisciplinarité fait de l’acte éducatif, du « care », un espace de débat où sont autorisées – et souhaitées – toutes les controverses entre références théoriques, entre pratiques, entre positionnements. L’interdisciplinarité est un écosystème des approches qui place en interactions les points de vue sur l’enfant. Cette conflictualité des références protège de l’enfermement dogmatique.

Le SESSAD est ce lieu d’ouverture au pluriel qui lui permet de s’articuler avec des disciplines différentes qui relèvent des champs pédagogique, clinique, éducatif, sanitaire, psychique, etc.

  • Coordination

Mais il ne suffit pas de mettre en débat les disciplines qui prennent soin de l’enfant. Cela pourrait ne pas produire d’effet de système pour son intérêt. Il faut qu’un élément du système pluriel fasse catalyseur pour le projet éducatif. Le catalyseur est l’élément qui permet à la réaction chimique de se produire. Il empêche la cohabitation pacifique et stérile des éléments pour les obliger à interagir, à réagir ensemble, à se transformer les uns les autres. Il me semble qu’une fonction de coordination qui ne se limite pas à inventorier les actes autour de l’enfant mais qui vise à ce qu’ils s’interpénètrent, à ce qu’ils provoquent des réactions ensemble, à ce qu’ils se transforment les uns les autres, doit être envisagée comme une fonction catalytique.

Le SESSAD est un catalyseur.

  1. QUELLES ORGANISATIONS ?

Nous avons situé quelques caractéristiques d’une institution du « care », nous avons repéré la manière dont celle-ci s’inscrit dans des lieux signifiants, nous venons de mesurer des pistes à ouvrir quant aux pratiques professionnelles, il nous reste à imaginer quelle organisation de travail serait au service de ces ambitions. Sans pouvoir être exhaustif, je propose trois ouvertures à notre réflexion : la question de ce qui fait centre dans les organisations, celle de la hiérarchie et, enfin, la perspective d’une polyvalence possible.

  • Polycentrisme

Contrairement à une idée reçue, les organisations de travail ne sont pas construites « autour » d’un centre. Cette vision jacobine qui a fait des désastres en matière urbaine – le mythe selon lequel c’est le centre qui fait la ville et qui a relégué les périphéries dans un statut de quartiers inférieurs – est une fiction qui alimente la conservation exclusive du pouvoir par ceux qui pensent l’avoir confisqué à leur profit. La réalité de toute organisation de travail est le polycentrisme. Elle est nécessairement pluri-nodale, réticulaire, déterminée par l’articulation complexe de nœuds signifiants, c’est-à-dire de nœuds qui font sens d’une vision plurielle, complexe et systémique de l’organisation. Au risque d’être simpliste pour tenter de faire percevoir à chacun ce que veut dire polycentrique, on peut penser que le « cœur » d’un établissement c’est le jardin pour le jardinier, la cantine pour le gourmand, la cuisine pour le cuisinier, la salle de psychomotricité pour le psychomotricien, le lit pour le paresseux, etc. Et bien sûr son bureau pour le directeur ! Plus sérieusement, on peut repérer que ce qui fait centre, selon les moments et les phases de l’histoire institutionnelle, ça se déplace, ça n’est jamais fixé et cela varie fortement selon les organisations et les références théoriques qu’elle mobilise. Dans cette institution fondée sur la psychanalyse, la supervision des équipes fait centre, mais pour celle-ci qui s’inspire de la psychothérapie institutionnelle ou des pédagogies nouvelles, citée plus haut, ce sont les lignes d’erre conceptualisées par Deligny qui font centre. Chercher les multiples centres, de toute nature et de tous registres – sans avoir peur de mélanger les plans – représente un enrichissement considérable pour analyser l’organisation.

Le SESSAD, sauf à se prendre pour un établissement médico-social classique, est naturellement une organisation polycentrique.

  • Polyarchie

La notion de polyarchie introduite par Edgar Morin – il évoque le fait que les systèmes sont généralement à la fois hiérarchiques, polyarchiques et anarchiques – fait suite à celle de polycentrisme. Elle s’appuie sur la conception foucaldienne du pouvoir qui ne se trouve jamais localisé en un point précis de l’organisation mais qui circule dans toutes ses dimensions et sur tous ses plans. Ce qui fait hiérarchie, selon les sujets, selon les acteurs, selon les moments peut être variable et pluriel.

La hiérarchie, celle qui figure dans l’organigramme pyramidal classique qui représente l’organisation de travail, n’est qu’un élément parmi d’autres qui situe les lignes de dépendance, de commandement, de subordination. Mais d’autres éléments jouent qui produisent des systèmes hiérarchiques parallèles, déviants, rétro-agissants, dissipatifs. Pour illustrer cela, il n’est qu’à citer les phénomènes de contre-pouvoir, les instances représentatives du personnel, l’articulation parfois compliquée entre instances politiques et instances techniques. La vision polycentrique transforme ces forces subversives en éléments participant pleinement à la construction du système d’action.

Le SESSAD croise, parfois à l’insu de son plein gré, tout un ensemble de rapports de forces, de dépendances et de subordinations qui placent les acteurs dans ce jeu de construction complexe d’un système d’action fortement interactif.

  • Polyvalence

Enfin, pour terminer, je voudrais battre en brèche l’idée qu’une organisation sociale ou médico-sociale, pour être « performante » doit être hyperspécialisée. La notion d’hyperspécialisation me semble incompatible avec l’idée même d’accompagnement des parcours de vie des usagers qui leur sont confiés. Le concept « une réponse accompagnée pour tous » – à relier ici avec les travaux en cours sur la réforme des modes de tarification de Serafin PH, avec la réforme prévue d’une simplification des autorisations en réduisant la nomenclature Finess, etc. – promeut mécaniquement l’idée d’une polyvalence des compétences de chaque organisation afin d’être en mesure d’accompagner chacun, chaque situation, dans leur singularité, voire à inventer des modes d’accompagnement non prévus. Mais cette polyvalence est à entendre avec ce qui précède, c’est-à-dire, essentiellement, le principe d’incomplétude et de complémentarités solidaires. Il s’agit ici de s’opposer à la spécialisation qui découpe l’action en rondelles de saucisson avec l’effet morcelant que l’on connaît pour les usagers.

La polyvalence est avant tout ici un positionnement bienveillant qui permet d’embrasser tout ce qui fait la vie des personnes. Pour comprendre un usager, il ne faut pas l’aborder par ce que l’on sait – ou croit savoir – de lui mais par le kaléidoscope qu’il donne à voir de sa vie, de ses besoins, de ses envies et désirs, de ses aspirations, bref, de ce qu’il est. La polyvalence est d’abord une question de regard ouvert à l’inédit, à se laisser surprendre. La polyvalence repose sur la volonté de développer une compréhension complexe des situations et, par voie de conséquence, de développer, avec d’autres, des réponses complexes, composites et hybrides qui refusent de s’enfermer dans l’exclusivité d’une solution unique et standardisée.

Le SESSAD, au prix d’un travail de remise en cause constante de ses fixités, peut être un espace de polyvalence.

[1] Texte inducteur de la journée

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Présentation de l’auteur

Roland JanvierRoland JANVIER, chercheur en sciences sociales, titulaire d’un doctorat en sciences de l’information et de la communication.
Je suis actuellement président du Comité Régional du Travail Social de Bretagne.
Repolitiser l'action sociale

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